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Guerre de 1870-1871 Morts du canton de Bourbon-Lancy
Guerre de 1870-1871 Morts du canton de Bourbon-Lancy
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Guerre de 1870-1871 Morts du canton de Bourbon-Lancy
L'auteur

http://www.alainboussuge.com/
Investigateur du parcours militaire des hommes durant les conflits : 1870-1871, 14-18, 39-45.

Historien par passion.
Les hommes de ma famille ont été mobilisés en 1870, 1914, 1939.
Où ont-ils combattu ? Qu’on-t-il enduré ? Ils sont revenus vivants, mais pas toujours indemnes.
Mon père, ACPG, acpgkrgef3945.canalblog.com
Un oncle, FFL, 2°DB, epagliffl.canalblog.com
Les victimes de guerre sont anonymes sur les monuments aux morts, elles revivent, pour peu que l’on s’intéresse à elles.
Bourbon-Lancy, en Saône et Loire, 2 monuments aux morts, 3 sites d’identification des morts
morts3945bl.canalblog.com – resistantsbl.canalblog.com 1870mortsdebourbonlancy.canalblog.com
Un livre, Le canton de Bourbon-Lancy dans la guerre de 1870-1871

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19 janvier 2021

Histoire de la création de la médaille commémorative

Médaille commémorative en faveur des anciens combattants de tous grades qui ont pris part à la campagne de 1870

Sous l’Ancien régime, deux décorations existent la Croix de Saint-Louis, créée par Louis XIV, le Mérite Militaire, créé par Louis XV. Elles sont remises aux officiers.
Sous le Consulat puis l’Empire, l’ordre de la Légion d’Honneur récompense les faits d’armes des militaires de tous grades. Le Second Empire crée la Médaille Militaire, destinée plus particulièrement aux soldats et aux sous-officiers.

A la différence de la France, le Royaume Uni commémore depuis le XVIII° siècle par une médaille spécifique chacune de ses campagnes. Tout naturellement il crée une médaille pour la guerre de Crimée, dans laquelle est engagée la France. L’Impératrice et reine Victoria accorde cette décoration à tous les soldats français ayant participé à ce conflit. La première médaille commémorative française est donc britannique ! Le Second Empire reconnaît cette médaille en avril 1856. Par la suite naissent en France, les médailles commémoratives liées à une campagne spécifique : campagne d’Italie (1859), expédition de Chine (1860), expédition du Mexique (1862-1867).

La défaite de 1870-1871 n’incite pas la République a créé une médaille pour les vétérans de la guerre selon le principe que l’on ne commémore pas une défaite. En revanche les campagnes militaires coloniales de la III° République donnent lieu à l’instauration de médailles commémoratives : expéditions du Tonkin, d’Annam et de Chine (1883), de Madagascar (1885 et 1895), du Dahomey (1892), de Chine (1902), du Maroc (1909). Comme on va le voir, les vétérans survivants de la guerre de 1870, sont oubliés. Il faut attendre l’année 1911, soit quarante ans après la fin de la guerre pour que la République légifère et crée par la loi du 9 novembre 1911, une médaille commémorative.

Dès 1882, le général Billot, ministre de la guerre, souhaite qu’il soit créé « une décoration officielle élevant à l’ordre de la Nation le courage malheureux de tous ces anciens combattants qui furent confrontés à la terrible réalité du conflit franco-allemand ». Il existe alors plusieurs médailles officielles et les insignes associatifs commencent à apparaitre, témoignages de la vocation de secours mutuel des sociétés, souvenir de la campagne et expression du désir de revanche. Mais pour une médaille commémorative de la guerre franco-allemande, il y a un obstacle de taille : la responsabilité de la défaite est attribuée au régime impérial déchu, à ses généraux incapables, et la République n’entend pas organiser un souvenir autour d’évènements malheureux et imputables à ses ennemis politiques, bonapartistes et conservateurs d’une manière plus générale. Cette médaille est jugée inopportune et tardive : c’est la médaille de la défaite. Un projet est repoussé par le Sénat à six reprises, au motif qu’on ne commémore pas une défaite, on ne pardonne pas l’humiliation. Pourtant, la République n’est pas chiche de reconnaissance et institue des médailles commémoratives pour les campagnes coloniales : Tonkin (1885), Madagascar (1886 et 1895), Dahomey (1892), coloniale avec nombreuses agrafes (1893), Chine (1902), Maroc (1909).

Autant les premières associations se sont cantonnées à leur rôle d’assistance mutuelle, puisque statutairement elles n’ont pas le droit d’avoir un rôle politique, autant les sociétés crées après 1893 ont une attitude plus revendicatrice, après le mouvement boulangiste et l’explosion du nationalisme. La première proposition de création de la médaille est présentée par Ernest Noël, député républicain de l’Oise le 8 mars 1894. Dans la foulée, D. Delahaye demande que soit créé, pour les anciens combattants, un ruban sans médaille et un insigne pour les blessés (une étoile). Mais des réserves sont aussitôt émises quant à l’attribution frauduleuse qui pourrait en être faite, pour des non combattants (déserteurs, ou Bretons du camp de Conlie). Pourtant, à la Chambre, le vote positif est écrasant : 285 voix sont pour, une seule, contre. Le Sénat en aura raison. En 1906, c’est au tour de Laurent Bougère, député du Maine-et-Loire, de réclamer l’institution d’une distinction honorifique pour les vétérans de 1870-1871, en vain.

Alors au cours du congrès de la société des vétérans en 1907, son président Joseph Sansboeuf propose de prendre en main la réalisation de ce vœu. S’en suivent une campagne de banquets, des visites officielles, des manifestations ; le journal « Le vétéran » publie des listes de parlementaires favorables à la médaille, en même temps que le Petit Journal publie plusieurs numéros illustrés, dont celui du dimanche 19 décembre 1909, avec dessin en couleur légendé « pour la médaille de 1870-1871, la France d’aujourd’hui rend justice aux héros d’autrefois ». Le 31 janvier 1910, une délégation se rend au Palais Bourbon pour déposer les 100 000 signatures obtenues à la suite de la pétition lancée le 13 mai 1909. À la suite de l’affaire Dreyfus, des attaques contre l’armée, du développement de la propagande antimilitariste et antipatriotique, la médaille doit être le témoin tangible de l’évolution de la politique gouvernementale, jusqu’à présent hostile à cette commémoration.

 

 

Le 11 février 1910, le député de la Seine Georges Berry monte à la tribune pour défendre un amendement au budget du ministère de la guerre, tendant à y inscrire la somme nécessaire à l’établissement d’un projet de loi pour la création de la médaille de 1870. L’amendement est voté par 549 voix contre 34 (le Sénat le vote ensuite le 7 avril suivant). Le compte rendu de séance publié au Journal officiel représente 6 pages dans lesquelles Berry expose les motifs de cet amendement : déjà, en 1898, un amendement semblable avait été voté par la Chambre mais repoussé par le Sénat. Mais, ajoute-t-il, « depuis, l’antipatriotisme est devenu en quelque sorte une religion, il a ses grands prêtres, ses desservants et ses disciples ». Aussi s’agit-il de « lutter, de protester contre de telles propagandes qui font tant de mal à la France et à son armée ». Il mentionne qu’une seule médaille a été accordée, à Strasbourg, au cuirassier trompette du général Michel, par l’empereur Guillaume « qui vous a montré l’exemple ». Et de citer également les médailles des campagnes coloniales attribuées à des militaires qui bien souvent n’ont pas affronté l’ennemi, ou encore les médailles « de défaites » comme la médaille russe de Sébastopol ou autrichienne de Sadowa, quand ce n’est pas celle de Sainte-Hélène. Le député Antoine Jourde lui répond longuement, affirmant que lui-même ancien combattant ne voit pas l’utilité d’une telle reconnaissance ; il est suivi par le ministre de la guerre le général Jean Brun, qui confirme son intention de ne pas présenter de projet de loi pour ne pas « rappeler la période la plus sombre de l’histoire ».

 

Les députés Georges Berry et Hubert de Montaigu

La création de la médaille est évoquée au Sénat dans sa séance du 1er avril, au cours de laquelle le vicomte de Montfort, malgré ses positions politiques, se déclare hostile à cette distinction. Il n’admet que la création d’un insigne pour les engagés mineurs qui ont ainsi fait preuve de dévouement exceptionnel, et d’un autre insigne pour les blessés. En réponse, M. Gervais se prononce pour une mesure générale et pour toute la campagne, ce qui permettrait la réunion de tous les Français. Moins péremptoire qu’à la Chambre, le ministre de la Guerre répond aux sénateurs qu’il étudiera la question. Mais rien ne vient, et au cours de la session de 1911, Georges Berry présente un nouvel amendement le 21 mars. Le ministre a changé, c’est maintenant le radical-socialiste Maurice Berteaux qui répond d’une manière tout à fait favorable à la proposition du député : il déclare en effet qu’« il est légitime de penser que le courage, même malheureux, doit être honoré, et il peut y avoir intérêt à rappeler aux jeunes gens qui n’ont pas vécu les heures terribles, qu’à un certain moment la patrie a traversé des épreuves douloureuse ». Dans les plus brefs délais, un projet de loi doit être déposé ; et il ajoute « jusqu’à présent, une chose est arrêtée dans mon esprit. J’ai l’intention de demander aux Chambres d’accepter pour cette médaille un ruban qu’on puisse considérer comme un symbole et qui, comprenant les couleurs noir et vert, dira les deuils du passé et nos espérances dans la grandeur de la patrie. J’estime aussi que le métal qui convient à une telle médaille doit être un métal sombre… Cette médaille doit être impressionnante par sa simplicité ; elle devra dire nos souvenirs et notre attachement à ceux qui, aux heures pénibles, ont ramassé l’épée de la France et ont réussi quand même à sauver l’honneur du pays ». Au Sénat, dans la séance du 15 avril, il informe que le projet est prêt et ajoute : « La médaille sera décernée à tout le monde. Il ne faut pas que, parce que le hasard des conditions sociales ou des évènements aura fait servir les uns comme officiers de Mobiles par exemple, alors que d’autres servaient comme sous-officiers, caporaux et soldats, que ces derniers ne reçoivent que la médaille commémorative, alors que l’officier recevrait la médaille et la croix… »

Le projet de loi est déposé sur le bureau de l’assemblée le 29 mai 1911. Le rapport à la Chambre est présenté par le comte Hubert de Montaigu, député monarchiste de Loire-Inférieure fraîchement élu à la suite de son père le marquis Pierre de Montaigu, châtelain de la Bretesche en Missillac. Lui-même est un ancien officier, son père a fait la guerre contre l’Allemagne. Sans débat, celui-ci ayant eu lieu lors du dépôt de l’amendement Berry, le texte est adopté le 3 juillet 1911, par 485 voix contre 1, après déclaration d’urgence et avec une seule modification concernant la renonciation à une agrafe particulière « défense de Belfort ». Toujours à la hussarde, le texte est transmis au Sénat le 11 juillet, rapporté par Cauvin le 12 juillet, et la loi est votée le même jour ; elle sera promulguée le 9 novembre 1911. Les Vétérans ont gagné leur combat.

 

Médaille de 1870

 

Lorsque Charles de Gaulle crée la médaille récompensant les Français méritants qui se sont engagés dans la France Libre et qui deviennent Compagnons de la Libération, il fait reprendre les mêmes couleurs pour orner le ruban, le noir du deuil et le vert de l'espérance.

 

Croix de la Libération de la France Libre

 

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